A l’heure où l’industrie extractive connaît un regain d’intérêt, motivé par les besoins en ressources, la recherche tente d’apporter des solutions pour accéder aux matières premières plus facilement et dans le respect de l’environnement. Hedi Sellami, directeur du Centre de Géosciences de Mines ParisTech, a présenté la conférence plénière du colloque Ressources naturelles et environnement, qui s’est déroulé le 5 et 6 novembre 2014 à l’Institut Mines-Télécom. Il a exposé les développements des centres de recherche des Mines dans le domaine des ressources minérales et hydrocarbures.
« Après les années 90 et la première moitié des années 2000 qui ont été dominée par des préoccupations environnementales, l’’industrie extractive connaît un regain d‘intérêt : les dépenses en exploration minières ont littéralement explosé depuis 2003, et les dépenses en exploration pétrolière ont, elles, augmenté de plus de 10% tous les ans. » Les minéraux d’intérêt économique sont désormais les minéraux énergétiques, les métaux, les matériaux de construction – qui sont les plus consommés par l’homme après l’air et l’eau – et enfin les minéraux destinés essentiellement aux industries. « Malgré la crise financière cette année, on prévoit que la demande va croître voire doubler dans les 15 ans à venir, avec l’essor des pays émergents. » La Chine représente plus de 40% de la demande mondiale.
Des ressources durables ?
Les matières minérales sont des ressources physiques, donc finies et épuisables. Cela pose des questions vis-à-vis du développement durable. « On estime qu’on a pour 20 ans de production pour l’or, 40 ans pour l’uranium et 1 siècle pour le charbon. » Elles sont géographiquement inégalement réparties : les terres rares, essentielles au développement des technologies dites vertes, sont principalement concentrées en Chine avec 90% de la production mondiale. Ces ressources sont aussi de qualité inégale, avec des teneurs allant de 0,1 à 10% pour l’uranium. « L’or est passé de 12 grammes par tonne extraite dans les années 70 à moins de 2 grammes aujourd’hui. » Il en va de même pour les hydrocarbures. « La production de pétrole conventionnelle est pratiquement plate depuis une vingtaine d’années, et la production de gaz devrait chuter de 2,5% tous les ans. » Or, concernant les réserves d’hydrocarbures, le déséquilibre est total entre les pays de l’OPEP et ceux de l’OCDE*. Et l’Europe est totalement dépendante des importations pour l’approvisionnement en matières premières, en particulier dites stratégiques, comme le platine ou le titane. « Cet appauvrissement des gisements exploités doit être compensé par des nouvelles méthodes de valorisation. »
Refaire de la mine en France ?
« Certains considèrent qu’on n’a exploité que les gisements de bonne qualité et les gisements qui affleurent. » La cartographie du sous-sol permettrait de savoir si il y a encore des ressources plus profondes dans le sous-sol français. Il est aussi envisagé d’exploiter les ressources maritimes, grâce au pilotage à distance. Enfin, se pose la question du développement de la mine furtive, une mine « invisible » qui serait moins traumatisante pour l’environnement. En parallèle, la chaire « Mines urbaines » de Mines ParisTech étudie les moyens d’organiser et d’optimiser l’économie du recyclage. Concernant les hydrocarbures, les chercheurs tentent d’accroître et d’améliorer le taux de récupération des hydrocarbures, qui plafonne aujourd’hui à 35%. Les experts considèrent qu’il est possible d’atteindre les 50%. « Si on gagne 1% sur le taux de récupération, c’est l’équivalent de 2 à 3 ans de consommation de pétrole. »
De nouvelles approches en géosciences
Ces enjeux appellent le développement de nouvelles approches en géoscience. « En matière de prospection, la géophysique doit s’améliorer, en particulier en termes de profondeur d’investigation. » Pour connaître de manière plus approfondie les gisements complexes, qu’il s’agisse de ressources minérales ou d’hydrocarbures, il est nécessaire de développer de nouvelles approches de caractérisation et de modélisation. En termes d’exploitation, l’industrie tend à améliorer la productivité dans les mines classiques, notamment en développant des méthodes d’exploitation plus maîtrisées, pour être à terme automatisées intégralement. Il y a également une transition progressive vers la mine non conventionnelle, grâce au développement de nouveaux procédés de valorisation des minerais complexes et à de nouvelles méthodes, telles que la récupération in situ ou les exploitations à distance. L’intérêt est aussi à l’exploitation des hydrocarbures frontières, comme les huiles lourdes, les réservoirs roches mères ou encore les réservoirs très enfouis. De nombreuses pistes, qui sont actuellement explorées par les chercheurs des centres de recherche en géosciences des écoles Mines-Télécom. « L’accent est mis aujourd’hui sur les non-conventionnels, en développant des approches spécifiques, de l’identification à la mise en valeur jusqu’aux impacts sur l’environnement et la sécurité à long terme, » précise Hedi Sellami.
*L’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole et l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques.
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