En 2019, l’Académie franco-allemande pour l’industrie du futur a lancé le projet de plateforme Joint AI. Associant l’IMT et l’université technique de Munich, cette plateforme favorise la collaboration entre chercheurs et entreprises pour le développement d’outils d’intelligence artificielle. Grâce à un environnement sécurisé, elle permet la protection de la propriété intellectuelle des résultats, et la reproductibilité des résultats scientifiques.
« La première finalité, c’est de soutenir les travaux de recherche entre France et Allemagne sur l’intelligence artificielle. » C’est ainsi qu’Anne-Sophie Taillandier commence sa description de la plateforme Joint AI, lancée en 2019 par l’IMT et l’université technique de Munich. Depuis 2015, les deux établissements sont engagés dans l’Académie franco-allemande pour l’industrie du futur. Ce partenariat donne lieu à plusieurs projets de recherche, dont certains en intelligence artificielle. Pour les chercheurs engagés dans les travaux de cette discipline, un problème régulier survient : la protection de la propriété intellectuelle des résultats.
« L’un des gros risques pour les chercheurs en IA, c’est d’exposer leurs travaux à des pairs académiques ou à des industriels et de se les faire dérober » renchérit Anne-Sophie Taillandier. Cette experte de l’intelligence artificielle en France porte depuis plusieurs années la plateforme TeraLab de l’IMT, qui a déjà pour objectif de faciliter la recherche en IA dans un environnement sécurisé. « En échangeant avec nos collègues de l’université technique de Munich, nous nous sommes rendu compte que chacun avait ses infrastructures pour héberger et développer des projets en IA, mais qu’il n’y avait pas d’équivalent transnational », pointe-t-elle. C’est ainsi qu’est né le projet de la plateforme Joint AI : comme un lieu commun, fiable et protégé, pour la recherche franco-allemande en intelligence artificielle.
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Pour cela, la plateforme s’appuie sur des outils techniques et juridiques. L’architecture matérielle et les espaces de travail sont pensés pour permettre d’héberger des données et de travailler dessus en s’adaptant au niveau de sécurité voulu. Grâce à un jeu d’API, les résultats d’un projet peuvent ainsi être mis en avant et partagé des deux côtés de la frontière sans la contrainte de devoir déplacer les données ou les logiciels mis au point. « Tout le monde peut travailler en confiance, sans avoir à donner accès à son exécutable ou à ses données » souligne Anne-Sophie Taillandier.
Un outil pour les chercheurs…
Pour les chercheurs en IA — comme pour les autres disciplines scientifiques — faciliter la coopération revient à faciliter la progression des travaux et des résultats. Ce constat est d’autant plus vrai pour toutes les recherches en lien avec l’industrie 4.0, comme c’est le cas des projets de l’Académie franco-allemande pour l’industrie du futur, que la plateforme Joint AI héberge actuellement. « La recherche sur l’industrie porte sur des infrastructures complexes, composées d’acteurs humains et de capteurs qui lient la dimension physique à la dimension numérique » justifie Georg Carle, titulaire de la chaire Architectures et services de réseau de l’université technique de Munich, et co-responsable du projet avec Anne-Sophie Taillandier.
Il pointe : « Pour être pertinente, cette recherche doit s’appuyer sur des données réelles et générer des modèles réalistes. » Or, plus les données sont partagées et travaillées par différentes équipes de chercheurs, plus les algorithmes qui en découleront seront efficaces. Pour Georg Carle, « la plateforme Joint AI permet de travailler la reproductibilité des résultats » entre équipes françaises et allemandes. « Cela donne lieu à des résultats de meilleure qualité, à l’impact plus important pour les acteurs industriels. »
… Et les entreprises !
Au-delà d’un outil de collaboration pour les chercheurs, la plateforme Joint AI est aussi une opportunité d’innovation pour les entreprises engagées dans la recherche partenariale. Lorsqu’un acteur industriel allemand souhaite collaborer avec des chercheurs français, ou l’inverse, les contraintes juridiques sur le déplacement des données est un frein majeur. Plus limitatif encore : au sein d’une même grande entreprise, une branche française et une branche allemande peuvent avoir du mal à s’échanger des données. « Les causes peuvent être diverses : des données personnelles des ressources humaines, des données liées à la propriété industrielle, ou encore des données concernant des clients avec lesquels il y a un engagement sur la confidentialité » détaille Anne-Sophie Taillandier.
Les entreprises ont ainsi besoin d’un lieu sécurisé sur les plans techniques et légaux capable de faciliter le travail en commun. Joint AI permet donc de favoriser l’implication d’acteurs privés dans de projets de recherche au niveau européen, comme des projets du programme cadre de recherche Horizon 2020 — ou Horizon Europe pour les projets de recherche européen à venir à compter de l’année prochaine. Une telle plateforme offre alors un prototype de solution à l’un des grands enjeux actuels en IA et en innovation numérique : le partage des données de manière sécurisée entre différents acteurs.
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