Le projet européen MADEin4 a été lancé en avril 2019 pour une durée de 3 ans. Il se propose de faciliter l’implication des fabricants de semi-conducteurs et des équipementiers dans une démarche d’amélioration continue de l’utilisation de leurs équipements. Comment ? En s’appuyant sur les nouvelles technologies que sont le jumelage numérique et la maintenance prédictive. Agnès Roussy et Valéria Borodin, enseignantes-chercheuses à Mines Saint-Étienne, partenaire de MADEin4, exposent le contexte dans lequel ce projet a vu le jour, et reviennent sur les verrous scientifiques à lever.
Dans quel contexte le projet MADEin4 est-il né ?
Agnès Roussy : Le projet MADEin4 (Metrology Advances for Digitized ECS Industry 4.0) est un projet ECSEL (Electronic Components and Systems for European Leadership). Il vise à soutenir et fédérer l’industrie des semi-conducteurs en Europe dans la transition numérique.
Quel est l’objectif général de ce projet ?
Valéria Borodin : Il consiste dans l’augmentation du rendement de production sans pénaliser son niveau de fiabilité dans la fabrication des dispositifs électroniques, dont la qualité doit être conforme aux exigences de plus en plus fortes du marché très compétitif des semi-conducteurs.
Quels moyens utiliserez-vous pour y parvenir ?
AR : Pour améliorer la productivité et faciliter l’intégration du numérique dans l’organisation du processus de fabrication chez les industriels du semi-conducteur et les équipementiers, au-delà de ce qui se fait dans l’état de l’art, le projet MADEin4 s’appuiera sur le concept de l’Industrie 4.0. Pour ce faire, deux boosters complémentaires seront actionnés dans le développement d’une ligne pilote : un accélérateur physique basé sur les nouvelles générations d’équipements de métrologie et d’inspection pour l’industrie microélectronique ; et un accélérateur numérique – le jumeau numérique (voir encadré) – intégrant les technologies de l’intelligence artificielle pour améliorer la prédiction de rendement et de performance équipement.
Quels défis technologiques et scientifiques se présentent à vous ?
VB : Le développement de jumeaux numériques et de modèles de simulation dédiés au pilotage et à la coordination d’une unité de fabrication à différents niveaux de décision relèvent de nombreux défis qui sont notamment liés à la cohérence numérique et décisionnelle de l’ensemble des activités industrielles. Dans ce sens, le concours et l’expertise des fabricants de semi-conducteurs et des équipementiers (fabrication et métrologie) jouent un rôle primordial dans la validation de la pertinence et de la faisabilité industrielle des solutions proposées par nous, les académiques.
En quoi consiste la contribution des chercheurs de Mines Saint-Étienne ?
AR : Un des axes de recherche, où le département Sciences de la Fabrication et Logistique (SFL) de Mines Saint Étienne est principalement actif, s’intéresse à la fabrication microélectronique à travers, d’une part le contrôle avancé des procédés, d’autre part la gestion quantitative des opérations du processus de fabrication, et enfin l’aide à la décision à différents niveaux (opérationnel, tactique et stratégique). Dans le cadre du projet MADEin4, nous nous proposons d’explorer les opportunités et d’identifier les limites des nouvelles technologies numériques dans l’usage intensif et l’analyse des données massives collectées par les équipements d’inspection et de métrologie.
Qui sont vos partenaires dans ce projet, et quelles collaborations sont importantes pour vos travaux ?
VB : Le projet MADEin4 combine l’expertise de 42 partenaires industriels et académiques venant de 11 pays. Nos partenaires industriels privilégiés dans le cadre de ce projet sont STMicroelectronics de Rousset et de Crolles. Ce projet, parmi d’autres, permet de continuer la longue et fructueuse collaboration académique de plus de 15 années entre le département Sciences de la Fabrication et Logistique (SFL) du Centre Microélectronique de Provence (CMP) de Mines Saint Etienne et les sites ST de Rousset et de Crolles. De nombreux équipementiers sont aussi présents dans ce projet ; cela va nous permettre de travailler avec eux au plus proche de l’équipement. Idem pour les partenaires académiques qui sont parties prenantes : ce projet européen va favoriser le démarrage de nouvelles collaborations dans le cadre de thèses ou de futurs appels à projets.
Quelles sont les retombées attendues ?
AR : Les retombées attendues du projet MADEin4 concordent fortement avec les orientations scientifiques et stratégiques de Mines Saint-Etienne et du Centre Microélectronique de Provence (CMP), qui promeuvent plusieurs thématiques phares : l’industrie du futur (Industrie 4.0) et l’Intelligence Artificielle (IA). Par le biais du projet MADEin4, nous nous proposons d’apporter des solutions de contrôle des procédés à destination des fabricants de semi-conducteurs, tout en explorant les opportunités d’applications des technologies de jumelage numérique, de renforcer le partenariat avec les fabricants de semi-conducteurs, et enfin de consolider la reconnaissance internationale du CMP sur des thématiques liées à la fabrication microélectronique.
Quelles sont les prochaines étapes importantes du projet ?
VB : Le projet MADEin4 a commencé il y a un peu plus de 6 mois. C’est une phase de démarrage excitante car tout semble possible. Concernant Mines Saint Étienne, la mise à notre disposition très prochainement de données industrielles venant de différents partenaires va nous permettre de confronter nos travaux de recherche à la réalité des contraintes industrielles. Dès la fin de la première année, la valorisation scientifique se réalisera par la publication des articles dans des revues internationales et via des communications orales au sein des communautés scientifiques concernées.
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