Glioblastome : le soin électrique ?

À Mines Saint-Étienne, le projet ATPulseGliome explore un nouveau mode de traitement anticancéreux. Dédiée à la lutte contre le glioblastome, un type de cancer du cerveau particulièrement virulent, cette approche thérapeutique exploite les stimulations électriques. À terme, elle pourrait permettre d’allonger l’espérance de vie des patients atteints de glioblastome comparativement à un traitement par chimiothérapie et radiothérapie. 

 

Le glioblastome est un type de cancer du cerveau peu répandu. Sur les 400 000 nouveaux cas de cancer décomptés chaque année en France, il représente 2 400 personnes, soit 0,6 %. Malheureusement, il est aussi l’un des moins cléments, puisque l’espérance de vie des patients atteints de glioblastome est de l’ordre de 12 à 15 mois avec soins. Pour améliorer les chances de survie des personnes touchées, Mines Saint-Étienne pilote le projet ATPulseGliome, en collaboration avec l’université de Limoges et avec un financement de la fondation EDF. Menée par Rodney O’Connor, l’équipe de chercheurs teste une approche utilisant les champs électriques pour trouver de nouveaux types de traitement.

Les cellules gliales se situent autour des neurones dans notre cerveau. Ce sont elles qui vont être touchées dans le cas du glioblastome. « Plus précisément, c’est un type de cellules gliales qui va être concerné : les astrocytes » précise Hermanus Ruigrok, biologiste cellulaire à Mines Saint-Étienne et chercheur sur le projet ATPulseGliome. Le rôle de ces astrocytes est habituellement d’apporter des nutriments aux neurones, de réparer des lésions dans le cerveau, et d’assurer la séparation entre le système nerveux et la circulation sanguine. Comme toutes les cellules, les astrocytes se régénèrent en se divisant. Le glioblastome survient lorsque les astrocytes se comportent de façon anormale en se divisant de manière incontrôlée.

Cibler le glioblastome sans toucher aux cellules saines

ATPulseGliome explore une voie de traitement basée sur la stimulation électrique des cellules cancéreuses. « Les astrocytes sains ne sont pas sensibles à l’électricité, mais les cellules du glioblastome le sont » explique Hermanus Ruigrok. Cette différence est la base de la stratégie de traitement qui va cibler uniquement les cellules cancéreuses, et pas les astrocytes et autres cellules saines. En effet, les cellules cancéreuses du glioblastome possèdent dans leur membrane une plus grande quantité de protéines sensibles à l’électricité.

Ces protéines agissent comme des portes qui laissent entrer ou sortir des ions, permettant ainsi la communication entre la cellule et l’environnement extérieur. Sous l’effet d’un stimulus électrique, cette porte va être déréglée. Une quantité anormalement élevée d’ions entre alors dans la cellule cancéreuse, ce qui est néfaste pour elle. « Toute cette stratégie nous permettrait de détruire uniquement les cellules cancéreuses, et pas les astrocytes sains qui restent insensibles au dérèglement induit par le stimulus électrique » souligne Hermanus Ruigrok.

Cellules de glioblastome, marquées par fluorescence.
Cellules de glioblastome, marquées par fluorescence.

 

Pour l’instant, il est bien trop tôt pour tester cette technique sur des patients. L’équipe d’ATPulseGliome travaille sur des lignées cellulaires de glioblastomes. Initialement, ces cellules proviennent bien d’un patient atteint du cancer en question, mais elles sont cultivées, reproduites et isolées pour des expériences in vitro. En s’affranchissant de toute la complexité des interactions moléculaires présentes dans un vrai patient, cette première étape permet de déblayer les objectifs scientifiques et de tester la faisabilité de tests in vivo. Durant cette phase, les chercheurs vont par exemple étudier différents types d’électrodes à utiliser pour envoyer le champ électrique, déterminer les caractéristiques du signal électrique nécessaire à la stimulation des cellules, ou encore mesurer les premières réponses des glioblastomes aux impulsions électriques.

Pour mener à bien toutes les étapes, l’équipe de Mines Saint-Étienne s’est associée à l’Institut des neurosciences de la Timone à Marseille. « Nous voulons engager le plus de spécialistes possible car le projet demande beaucoup de compétences : des biologistes, des électroniciens, des neurologues, des chirurgiens… » pointe Hermanus Ruigrok. Bien que longue à mettre en place, cette approche multidisciplinaire pourrait allonger l’espérance de vie des patients. « Il est impossible de dire à l’avance à quel point l’approche par champs électriques sera plus efficace que la chimiothérapie et la radiothérapie déjà utilisées » confie le chercheur. « S’il est peut-être difficile de guérir totalement de ce cancer, contrôler et limiter son évolution afin d’allonger significativement l’espérance de vie des patients atteints de glioblastome serait une satisfaction. »

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