SDN et virtualisation : plus d’intelligence dans les réseaux 5G

Les nouveaux usages de la 5G impliquent un nouveau mode de gestion des réseaux de télécommunication. Pour permettre l’entrée de nouveaux acteurs, il faut pouvoir découper et virtualiser des tranches de réseau, et les allouer de façon dynamique à des services. Cette organisation est rendue possible grâce au SDN : une technique qui repense l’architecture réseau pour la rendre plus flexible. À EURECOM, les chercheurs l’exploitent pour rendre les réseaux plus intelligents.

 

La 4G n’a pour but que de répondre à un seul usage : le haut débit internet. La 5G devra non seulement poursuivre cet effort, mais aussi satisfaire les services de l’internet des objets, et assurer des communications considérablement plus fiables pour la transmission de données sensibles. Faire cohabiter ces trois usages au sein du même type de réseau n’a rien d’évident. D’autant plus que chacun d’entre eux donnera lieu à de nombreux services, et donc de nouveaux opérateurs à faire s’entendre. Selon les demandes, il faudra privilégier un service plutôt qu’un autre. Cela implique de pouvoir gérer les ressources de façon dynamique.

Il est donc nécessaire de trouver une nouvelle façon d’organiser le réseau. Une solution est de le découper en tranches : c’est le « network slicing ». Les infrastructures restent les mêmes, sous contrôle des opérateurs déjà en place, mais elles sont partagées virtuellement avec les nouveaux opérateurs. « Chaque service partage le réseau avec d’autres, mais dispose d’une tranche indépendante qui lui est spécifique » résume Adlen Ksentini, chercheur à Eurecom sur les réseaux mobiles. La tranche laissée à l’opérateur virtuel est une découpe de bout en bout. C’est à dire qu’elle laisse une place au nouvel entrant aussi bien sur le partage de la bande passante radio que sur la plateforme de gestion de cette ressource radio.

Pour les chercheurs, le principal challenge posé est celui de la durée de vie des tranches. Le système de découpage doit pouvoir les créer et les terminer à la demande. Un système de collecte de données des objets connectés ne va pas fonctionner toute la journée par exemple. « Si un distributeur d’électricité relève les données des compteurs intelligents entre minuit et 4 h du matin, il faut pouvoir créer une tranche juste sur cet horaire pour allouer les ressources à d’autres services le reste du temps » illustre Adlen Ksentini.

Plus d’intelligence dans le réseau

La mise en œuvre et la réalisation de telles tranches sont rendues possibles grâce à un nouveau type d’architecture réseau, dont le comportement est défini par programmation. Jusqu’à présent, les chemins suivis par les données dans le réseau étaient dictés par les routeurs. Les boîtiers physiques, disséminés à travers le réseau, géraient l’acheminement des paquets d’information. Avec la nouvelle architecture, dite SDN — pour software-defined network — une entité centrale commande les équipements et permet de prendre les décisions de routage.

Le plus gros apport du SDN est la flexibilité dans la gestion des réseaux. « Dans une architecture classique, sans SDN, les règles de routage sont fixées à l’avance et sont difficilement modifiables » détaille Christian Bonnet, également chercheur à Eurecom en réseaux et télécommunications. « Le SDN permet de mettre une intelligence dans le réseau pour changer ces règles au besoin » poursuit-il. C’est cette plus grande liberté qui permet de découper le réseau, en créant des règles qui isolent des chemins de données pour un usage spécifique à chaque service.

Les chercheurs d’Eurecom explorent les possibilités offertes par ces nouvelles architectures sur la plateforme technologique OpenAirInterface (OAI). « Nous expérimentons à la fois comment transformer le réseau 4G pour introduire de l’intelligence dedans, et comment aller vers une architecture 5G » explique Christian Bonnet. Ces travaux en open source permettent de comprendre la façon dont le SDN impacte l’état des ressources radios, son potentiel pour la création de nouveaux services et les contraintes liées, ou encore les opportunités pour améliorer la gestion de la mobilité (voir encadré en fin d’article).

« Techniquement, il y a plusieurs possibilités pour implanter le SDN et réaliser le découpage réseau » souligne le chercheur. « Comme chaque opérateur a des exigences un peu différentes, de nombreuses pistes sont explorées. » Chaque opérateur pourrait avoir sa propre façon de virtualiser son réseau pour permettre l’entrée de nouveaux services. Le 3GPP, l’organisme de standardisation des technologies de communications mobiles, pourrait cependant jouer un rôle de consolidation dans un futur proche, si d’aventure les acteurs choisissaient d’aller dans une direction commune.

Cet article fait partie de notre dossier 5G : la nouvelle génération mobile est déjà une réalité

Le SDN pour mieux gérer la mobilité

L’architecture SDN peut être utilisée pour assurer la continuité d’émission de données vers un terminal mobile. Grâce à cette technique, il est possible de mieux piloter des changements d’interface pour basculer d’un réseau 4G sur un réseau WiFi, sans interruption du flux d’information. Par rapport aux techniques de mobilité traditionnelles, le SDN est plus rapide, et permet de diminuer le nombre d’opérations de gestion du flux à effectuer. Pour l’utilisateur final, cela se traduit par une meilleure qualité de service.