Simuler. Prototyper. Mesurer. Recommencer. La mise au point d’une pièce industrielle passe inévitablement par ce cycle. D’abord modélisée numériquement, ses caractéristiques se verront évaluées par simulation. Une première version de la pièce sera ensuite construite. Soumis à des contraintes mécaniques pour évaluer sa résistance, le prototype sera observé sous toutes les coutures. Les résultats des tests serviront à améliorer la modélisation, qui donnera naissance à un nouveau prototype… et ainsi de suite jusqu’à une version finale satisfaisante. Pour répéter ces opérations le moins possible, Renaud Gras et Florent Mathieu ont créé la start-up Eikosim, incubée à Paristech Entrepreneurs depuis un an. Ils développent des logiciels spécialisés dans l’aide aux ingénieurs sur ces étapes de conception.
La clé pour gagner un maximum de temps ? Faciliter la comparaison entre les essais numériques et la mesure. Eikosim répond à ce besoin en intégrant les résultats de mesure enregistrés pendant les tests directement dans le modèle numérique de la pièce. Déformation, propagation d’une fissure ou encore évolution des propriétés mécaniques sont ainsi reportées sur la version digitale de l’objet. Les ingénieurs peuvent alors comparer facilement les évolutions mesurées lors des tests à celles prédites par la simulation, et ainsi corriger de manière automatique cette dernière pour qu’elle corresponde mieux à la réalité. La solution proposée par la start-up est une rupture, car l’alternative historique consiste à stocker les mesures réelles sous la forme d’un tableau de données, et à créer des algorithmes pour les recaler manuellement avec la simulation. Une opération longue et fastidieuse.
Autre force de la jeune pousse : ses logiciels permettent une optimisation des mesures sur les prototypes, en facilitant par exemple le positionnement des caméras d’observation. L’un des challenges est en effet de s’assurer que leur position réelle soit bien étalonnée pour enregistrer correctement les mouvements. Pour cela, les caméras sont normalement placées à l’aide d’une mire et agencées par un procédé complexe et, là encore, long. Mais les logiciels d’Eikosim offrent la possibilité d’enregistrer directement la position des caméras sur le modèle numérique de la pièce. Plus besoin de mire, l’étalonnage est bien plus rapide. Conséquence : la technologie est compatible avec des pièces de grande taille, comme des châssis de train. Des dimensions trop importantes pour les technologies concurrentes qui ont du mal à agencer beaucoup de caméras autour de pièces aussi imposantes.
Les solutions de la start-up séduisent les industriels, en particulier dans l’aéronautique. Le secteur innove sur les matériaux mais doit constamment faire face à des contraintes de sécurité. La justesse des simulations y est cruciale. Dans cette industrie, 20 % du temps des ingénieurs est consacré à la comparaison entre simulation et essais réels. Des logiciels aussi performants que ceux d’Eikosim représentent ainsi une aubaine pour accélérer les temps de développement.
Les fondateurs
C’est après une thèse au Laboratoire de Mécanique et Technologie de l’ENS Paris-Saclay que Renaud Gras et Florent Mathieu fondent Eikosim. Forts de leur expertise sur la compréhension du comportement des matériaux grâce à l’instrumentation des essais par imagerie, ils souhaitent à présent diffuser ces compétences au niveau de l’industrie grâce à leur start-up.