Coherent : une interface de programmation unifiée pour la 5G

Projets européens H2020Alors que le nombre de machines et d’utilisateurs connectés ne cesse d’augmenter, il faut repenser les réseaux de télécommunications et prévoir la 5G : la 5e génération de réseau de communications mobiles. L’enjeu est de permettre un plus grand degré de flexibilité pour contrôler et programmer le réseau, mais aussi la compatibilité de multiples technologies d’accès et cas d’usages différents. C’est l’objectif du projet européen H2020 Coherent auquel contribue Eurecom.

 

Dans le cadre d’Horizon 2020, le 5G-PPP — partenariat public-privée regroupant les opérateurs télécom — coordonne le projet européen Metis-II, dont l’objectif est de dessiner un système global répondant aux besoins de la 5G. Des projets connexes étudient plus précisément les composants nécessaires pour mettre en place le système 5G. C’est notamment le cas du projet Coherent (Coordinated control and spectrum management for 5G heterogeneous radio access networks). Celui-ci s’intéresse à un problème très spécifique de la 5G : la programmabilité des réseaux d’accès radio, pour des cas d’usages très variés. « La programmation des réseaux d’accès radio va au-delà de la reconfiguration en temps-réel : il faut régler les problèmes d’interférences, pouvoir coordonner les transmissions de deux stations de base, charger des nouvelles fonctions dynamiquement, etc. » explique Navid Nikaein, chercheur à Eurecom. Afin de parvenir à cela, les chercheurs s’inspirent de technologies existantes pour les réseaux filaires, comme le SDN (Software-Defined Networking) et le cloud computing. Le SDN est un modèle d’architecture réseau permettant à un administrateur d’organiser le trafic depuis une plateforme de contrôle opérationnelle centrale, désolidarisée de la partie matérielle de l’équipement (tel qu’un commutateur). Cette séparation est appelée « abstraction ». En s’inspirant de tels exemples, l’idée est de permettre à tous de développer des applications réseaux pour la 5G sans avoir à maîtriser les technologies radios, via une interface de programmation unifiée.

Le défi consiste à créer des modèles d’abstractions pour chaque mode de transmission et réception, qui permettront d’avoir une vision globale du réseau d’accès. C’est-à-dire : des graphes représentant les interférences, les ressources disponibles et la charge de réseau, les temps de latence, les spectres de fréquence, etc. A partir de ce modèle, les chercheurs pourront développer une interface de programmation unifiée, les autorisant à contrôler le comportement du réseau de manière générique sans connaître précisément chaque technologie. « Nous allons pouvoir appliquer des règles qui peuvent être facilement changées ou mises à jour. Par exemple, pour attribuer des fréquences aux stations de bases, ou bien pour faire des transmissions coordonnées depuis plusieurs stations de bases vers un même terminal » précise Navid Nikaein.

Cette interface de programmation servira à développer des applications telles que le partage des réseaux d’accès entre des opérateurs virtuels, ou encore la localisation des terminaux. Navid Nikaein et son équipe ont prévu de développer plusieurs applications spécifiques à des cas d’usage propres à la 5G : notamment la communication M2M (Machine to machine), mais aussi pour Thalès la communication D2D (Device to device) dans les réseaux de sécurité publics et le cas où les stations de base sont embarquées dans des véhicules et bougent. « Beaucoup de cas d’usages restent à inventer et ouvrent la voie à de nouveaux services, comme par exemple un service qui fournit de l’information locale à une communauté » ajoute le chercheur d’Eurecom.

L’objectif des scientifiques est de mettre au point un prototype fonctionnel tout en contribuant à l’élaboration de standards. Pour cela, ils se baseront sur la plateforme OpenAirInterface, une plateforme de programmation en logiciel libre pour les réseaux 4G et 5G déjà développée par Eurecom.

Cet article fait partie de notre dossier 5G : la nouvelle génération mobile est déjà une réalité

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Chercheurs : quelques conseils pour se lancer dans un projet européen, par Navid Nikaein, chercheur à Eurecom.

« D’après moi, il y a deux stratégies pour être présent dans un projet européen tel que Coherent. Soit il faut s’associer aux industriels avec lesquels nous développons une activité phare et qui peuvent nous emmener avec eux dans le projet ; soit il faut créer un consortium ciblé pour la conception et la rédaction d’un projet.

Aujourd’hui, la rédaction d’un projet européen n’est pas simple, il faut avoir une proposition très bien ficelée. Selon moi, l’effort estimé pour écrire un projet qui ait une chance de réussir est de deux à trois mois à plein temps. C’est vraiment beaucoup, sachant qu’en plus nous ne sommes pas sûrs que le projet sera accepté. Il faut donc choisir soigneusement le concept du projet et bien rédiger la proposition, pour qu’il y ait très peu de chance qu’il soit mal interprété. Il faut surtout créer des partenariats forts avec des entités qui connaissent très bien le sujet. »

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