La prothèse du genou autonome et adaptative d’Andrea Collo

(2/3) Qui sera le grand gagnant du prix de thèse Futur&Ruptures ? Réponse le 7 avril prochain, lors de la cérémonie de remise des Prix de la Fondation Télécom. Auteurs de thèses distinguées pour leur excellence, les trois lauréats recevront chacun un prix, pour un montant total de 9 500 €. En attendant de connaître le classement final, nous vous présentons dans une série de trois billets leurs travaux, menés au sein des laboratoires des écoles de l’Institut Mines-Télécom.

Andrea Collo a été récompensé pour ses travaux, menés à Télécom Bretagne, sur le développement d’une prothèse du genou autonome et adaptative, capable de compenser les déséquilibres ligamentaires qui peuvent advenir après l’opération.

L’arthroplastie totale de genou (ATG) est une opération chirurgicale qui consiste à remplacer entièrement l’articulation du genou par une prothèse suite à plusieurs maladies (arthrose, ostéoporose, usure et défauts des tissus mous de l’articulation, déchirures des ligaments et des cartilages). Pour éliminer la douleur et rétablir la mobilité du genou, la prothèse doit être positionnée de manière à garantir l’équilibre ligamentaire au niveau des deux ligaments collatéraux du genou, les seuls qui ne sont pas enlevés. Or, dans environ 10% des cas, après l’opération, il arrive que les composants prothétiques s’écartent légèrement de leur position de départ, et qu’un des ligaments se relâche. Cela entraîne des douleurs sévères et une mobilité réduite chez le porteur de prothèse, ainsi que l’usure prématurée de la prothèse. À l’heure actuelle, la seule solution pour rétablir des conditions d’équilibre optimales est la chirurgie de reprise, une intervention extrêmement coûteuse (entre 30 et 50 k€) et contraignante à la fois pour le patient et le chirurgien. À l’heure actuelle, environ 19 ATG de reprise sont réalisées chaque jour en France (95 aux USA).
ATG
Andrea Collo a donc conçu un mécanisme miniaturisé, robuste et biocompatible, qui permet de retendre un ligament relâché en postopératoire sans avoir recours à la chirurgie. Le système est embarqué dans le composant tibial de la prothèse : une vis sans fin permet de déplacer une cale, qui vient soulever le plateau tibial du côté du ligament relâché, ce qui a pour effet de le retendre. Le système d’actionnement est alimenté et contrôlé à distance, par induction magnétique et via un système de télémétrie miniaturisé. Cette technique permet de compenser le déséquilibre ligamentaire et de modifier l’alignement tibiofémoral jusqu’à 3 degrés.

Correction déséquilibre ligamentaire
Pour ce projet, il s’est appuyé sur la prothèse intelligente précédemment développée par Shaban Almouahed : grâce à quatre capteurs de force piézoélectriques intégrés dans la partie tibiale de la prothèse, elle est capable de détecter le relâchement d’un ligament et d’envoyer les données récoltées au chirurgien par radiofréquence. Grâce à ces données, celui-ci peut estimer au millimètre près le nombre de tours de vis nécessaires pour retendre le ligament. Il lui suffit ensuite d’actionner le mécanisme développé par Andrea Collo.
act2
Le chercheur a mis au point un prototype fonctionnel, testé avec succès sur un simulateur de genou. Il vient d’obtenir un financement sur 24 mois de l’Agence nationale de la recherche (ANR projet Emerge), qui va lui permettre d’améliorer encore son prototype, notamment la miniaturisation du moteur qui actionne le mécanisme, et peut-être d’entrer en phase de validation clinique.

Lire l’article de Lexians « Voyage au cœur du genou avec Andrea Collo, concepteur d’un implant intelligent »
Voir le blog d’Andrea Collo
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Titre de la thèse : Développement d’un dispositif implantable pour la correction du déséquilibre ligamentaire

Résumé : Un des objectifs principaux de l’Arthroplastie Totale du Genou (ATG) est la mise en place de conditions appropriées de tension ligamentaire au niveau des deux ligaments collatéraux de l’articulation. Cette étape, qui est effectuée manuellement par le chirurgien, détermine directement la fonctionnalité de l’implant prothétique et sa durée de vie postopératoire. Au cours des deux dernières décennies, plusieurs outils ont été développés en tant qu’outils d’aide au chirurgien pour la phase d’équilibrage ligamentaire. En dépit de cela, les imprécisions peropératoires sont pratiquement inévitables et risquent de donner lieu à des complications postopératoires. Dans le pire des cas, une reprise chirurgicale devient nécessaire pour rétablir des conditions d’équilibre optimales. Dans ce contexte, cette thèse a pour objectif l’étude, la conception et l’analyse d’un modèle original de prothèse instrumentée de genou qui soit capable de détecter toute condition de laxité ligamentaire postopératoire et, si nécessaire, de la compenser. Un système d’actionnement miniaturisé embarqué dans l’embase tibiale a été proposé pour ajuster l’inclinaison du plateau tibial de façon à retendre un ligament collatéral trop relâché. Cette opération, réalisée avant la survenue de complications plus graves, est suffisante pour rétablir des conditions d’équilibre optimales sans besoin d’une seconde intervention chirurgicale. Pour ce faire, une structure mécanique a été conçue et dimensionnée de façon à répondre aux besoins cliniques tout en faisant face aux contraintes de biocompatibilité imposées par un milieu biologique tel que celui du genou. L’analyse du modèle mécanique du système d’actionnement proposé a confirmé son bon rendement ; les simulations effectuées sur le modèle 3D de l’implant ont permis d’en optimiser la conception. Suite à la fabrication d’un prototype à taille réelle de l’implant proposé, des essais expérimentaux ont été conduits à l’aide d’un simulateur du genou pour valider le principe de fonctionnement du système d’actionnement et pour en évaluer les performances lors de la marche. Les résultats très prometteurs de la phase de validation expérimentale ont également fourni des indications précieuses pour l’orientation et la suite de travaux futurs.